Laos : 50 ans après, le triste héritage de la guerre du Vietnam
50 ans après les Accords de Paris du 27 janvier 1973, l’héritage des bombardements massifs lors de la guerre du Vietnam est bien tangible. Le Laos voisin a été particulièrement touché, alors même qu’il n’était pas partie au conflit. Le pays est aujourd’hui considéré comme l’un des plus pollués au monde par les armes à sous-munitions.
Cette bombe de 450 kg a été trouvée par des enfants près du village laotien de Souang Ngai. L'équipe de Handicap International l'a déplacée vers un site sécurisé pour la neutraliser et la détruire, un travail de près de 3 heures. Photo d'archive 2008 | © Tim Dirven - Panos
Origine et nature de la contamination au Laos
Entre 1964 et 1973, les États-Unis ont effectué quelque 600 000 missions de bombardement sur le Laos, soit l'équivalent d'un raid toutes les 8 minutes. Officiellement, cette stratégie du « tapis de bombes » avait pour but de couper les lignes d'approvisionnement d’armes du Nord Vietnam.
Au total, plus de 270 millions de bombes à sous-munitions ont été utilisées pendant cette guerre. Interdites par le Traité d’Oslo depuis 2008*, celles-ci ont des conséquences dévastatrices. Larguées par avion ou tirées depuis le sol ou la mer, elles libèrent à mi-parcours des dizaines, voire des centaines de bombelettes appelées « sous-munitions », qui peuvent couvrir une superficie de la taille de plusieurs terrains de football. Toute personne se trouvant dans la zone d’impact, militaire ou civil, sera très probablement tuée ou grièvement blessée.
Depuis de début de la guerre en 1964, plus de 50 000 personnes ont été tuées ou blessées dans des accidents causés par des restes explosifs de guerre, dont environ la moitié en temps de paix. Certaines munitions n’explosant pas immédiatement à l’impact (entre 5 et 40 % de taux d’échec à l’impact), elles représentent un risque pour les civils des décennies après la fin d’un conflit. Au Laos, on estime à environ 80 millions le nombre d’armes à sous-munitions non explosées et enterrées dans le paysage laotien après la fin de la guerre.
Une contamination toujours d’actualité
Le 27 janvier 2023 marque le 50e anniversaire des Accords de paix de Paris. Conclus entre les États-Unis et la République démocratique du Vietnam (Nord Vietnam), ils scellent le désengagement militaire américain. 50 ans après, les conséquences de cette guerre sont toujours perceptibles au Laos. Plus de 15 000 survivants d'accidents dus aux mines et aux restes explosifs vivent au Laos et nombre d'entre eux souffrent de blessures chroniques, ce qui implique un soutien continu.
50 ans après la guerre du Vietnam, son pays voisin, le #Laos, reste celui le plus pollué au monde par des restes explosifs. ???? Depuis bientôt 30 ans, Handicap International mène des opérations de déminage. pic.twitter.com/KjWRgYqvkh
— Handicap International France (@HI_france) January 27, 2023
En outre, 1 177,55 km² de terres sont contaminées. Forêts, rizières, villages, terrains d'écoles et routes se trouvent dans ces vastes zones, dont se retrouvent ainsi dépossédés les habitants. En parallèle, on estime qu’environ 25 % des villages de plus de 10 000 habitants sont contaminés par des munitions non explosées.
« Nous sommes en contact avec des munitions explosives presque tous les jours, nous devons donc être vigilants en permanence. Il y a quelques jours, nous avons trouvé et détruit plus de 10 armes à sous-munitions et munitions explosives en une journée, alors que nous nettoyions une rizière dans le village de Homphanh, dans le district de Houameuang, au nord du Laos ! »
Lamngueun, experte en neutralisation des explosifs et munitions au Laos
La contamination représente un obstacle majeur au développement du pays en limitant les activités agricoles et forestières, et en augmentant le coût des projets d'infrastructure dans les zones rurales. La dépollution des terres est essentielle pour le développement socioéconomique du Laos.
Handicap International au Laos depuis 40 ans
Handicap International vient en aide aux victimes des restes explosifs de guerre au Laos depuis 1983. L’équipe présente sur place est composée de 73 personnes, expertes dans des domaines variés : spécialistes en enquête et en dépollution (opérations de déminage depuis 1996), médecins traumatologues, personnel chargé de la sensibilisation aux risques, équipe d'assistance aux victimes formée pour identifier et orienter les personnes handicapées (y compris les victimes de munitions explosives), etc.
Depuis 2006, les équipes de déminage de Handicap International ont déminé plus de 574 hectares de terrain (l’équivalent de la superficie de près de 800 terrains de football) et détruit plus de 43 000 engins explosifs. Des actions sont actuellement mises en œuvres dans les provinces de Houaphan et Phongsaly.
L’éducation aux risques auprès des communautés est également un levier essentiel pour réduire le nombre d'accidents. Les sessions permettent aux habitants de connaître le comportement à adopter lorsqu'ils rencontrent des objets inconnus qui pourraient être des munitions non explosées.
Les équipes de l’association se rendent également dans les villages pour recueillir des informations sur les objets suspects et, le cas échéant, sur les accidents qui ont pu se produire dans la région.
Au total, l'éducation aux risques et la dépollution ont permis de faire baisser le nombre de victimes signalées de 304 en 2008, à 24 en 2020.
* À ce jour, 123 pays ont signé le Traité d’Oslo.
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