« Le traité d’Ottawa est crucial pour nos opérations de déminage au Liban »
Roger Eid est responsable des opérations de déminage de HI au Liban. Il nous explique l’importance du déminage et comment sont réalisées ces opérations indispensables.
Mine antipersonnel israélienne trouvée et marquée par un triangle rouge par l’équipe de déminage HI dans le village de Btater dans le district d’Aley au Liban. | © HI
HI intervient dans le déminage au Liban notamment dans le gouvernorat du Mont-Liban. Roger nous explique les enjeux d’une telle pratique.
Quels sont les objectifs du déminage au Liban ?
Déminer des terres polluées par des restes explosifs de guerre permet d’améliorer l’accès à des terres et des infrastructures sûres pour les communautés affectées par la guerre civile au Liban (1975 – 1990).
En complément de la dépollution des terres, HI réalise des sessions d’activités d’éducation aux risques de restes explosifs de guerre à Arsal dans le gouvernorat de Baalbeck Hermel. Ces activités visent à promouvoir des comportements sûrs pour réduire les risques de restes explosifs de guerre en sensibilisant les communautés ciblées. En tout, à Arsal, plus de 200 sessions de sensibilisation ont été réalisées pour 1700 bénéficiaires.
Quelle est la journée type d’un démineur ?
Chaque démineur se réveille très tôt, à 4h00 du matin, afin d’éviter de travailler sous la chaleur. Les démineurs arrivent à 6h30 à la base d’Aley et récupèrent l’équipement et les outils nécessaires.
Le superviseur du site et le chef d’équipe briefent les démineurs sur les objectifs et la sécurité. Les démineurs peuvent alors commencer à travailler, vêtus d’un équipement de protection, d’un détecteur de mines, d’une pelle, … La durée de chaque intervention est de 50 minutes par démineur. La mission de la journée s’arrête après 6 à 7 roulements par démineur. L’équipe range les outils et l'équipement puis retourne à la base avant de rentrer chez eux.
Les démineurs commencent à tester l’utilisation des drones pour localiser les restes explosifs de guerre dans les districts d'Aaqoura et d'Aley. Cette technique est efficace pour collecter des informations visuelles d'une zone dangereuse et rechercher rapidement des signes de restes explosifs de guerre. L’utilisation des drones peut accélérer la remise à disposition des terres.
Où les opérations de déminage HI ont-t-elles lieu ?
En ce moment, l’équipe de déminage dépollue au Mont-Liban, dans le district d'Aley. Notre équipe est composée de 12 personnes dont 7 démineurs. Les villages de Bsatine, Btater et Chartoune sont actuellement en train d’être déminés. Par exemple, la zone de déminage à Chartoune se trouve à 80 mètres de la maison la plus proche, une ferme se trouve également à 75 mètres. La zone polluée est une terre agricole, sur laquelle étaient plantés des oliviers, des arbres fruitiers et des pins. 5 mines ont été trouvées à ce jour et détruites sur place.
La zone à déminer est sélectionnée en coordination avec le Centre d'action contre les mines du Liban qui a mis en place un « système de priorisation du déminage 2020 ».
Combien de mètres carrés de terres ont été déminés depuis le début des opérations par HI ?
L’équipe de déminage de HI au Liban a dépollué presque 1 million de mètres carrés (en dix ans d’opérations) dont 10 500 m² depuis janvier 2022 En tout, 6 145 engins explosifs ont été sécurisés.
Au total, les opérations HI ont permis de libérer de l'impact des mines et des restes explosifs de guerre 56 villages dans les districts de Batroun, Koura et Bcharre où 192 champs de mines ont été nettoyés et rendus à la communauté. Et les réserves naturelles du Cèdre ont également été dépolluées à Niha, Tannourine et Hadath El Jebbeh.
Les bénéficiaires directs des terres déminées sont les agriculteurs et les paysans qui utilisent des champs pour travailler. Les bénéficiaires indirects sont la communauté vivant dans chaque village où se trouvent les terres libérées, l'école....
Avons-nous une estimation de l'étendue de la contamination au Liban ?
Le Liban compte encore plus de 18 km2 de zones minées confirmées, y compris le long de la Ligne bleue dans le sud du pays.
Est-ce que le Traité d'Ottawa qui interdit l'acquisition, la production, le stockage et l'utilisation des mines antipersonnel est crucial pour les opérations actuelles de déminage au Liban ?
Oui, le Traité d'Ottawa est crucial pour nos opérations de déminage au Liban. Le Liban n’est pas membre du traité d’Ottawa qui interdit les mines antipersonnel et oblige à la décontamination des zones minées. Mais il nous donne une légitimité et la motivation nécessaires pour poursuivre notre mission dans ce pays. Le traité d’Ottawa est devenu une norme internationale ; il a été rejoint par 164 Etats. Il a une énorme influence au Liban. Il nous met au défi d'étendre nos opérations à de nouvelles zones et d'accélérer les activités de déminage en testant de nouvelles approches innovantes comme les enquêtes par drone.
Quels sont les projets futurs après le déminage de ces terres ?
HI prévoit d'augmenter ses équipes à deux minimum dans chaque district où elle interviendra, afin de poursuivre son engagement dans le déminage des mines terrestres et des armes à sous-munitions. HI se concentrera sur les zones prioritaires du gouvernorat du Mont Liban, tels que les districts d'El Matn et du Chouf. Ces districts ont été gravement touchés par la guerre de 1975 et sont contaminés par de nombreux types de restes explosifs de guerre dont des mines antipersonnel et des bombes à sous-munitions.
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